De tout temps, les sociétés ont développé de nouveaux outils et façons de faire pour répondre aux défis de leur environnement. Si l’innovation est le plus souvent perçue comme une valeur ajoutée économique ou même technologique, une nouvelle acception du concept prend de plus en plus d’importance : l’innovation sociale.
Une innovation sociale peut se définir comme une initiative visant à apporter une réponse novatrice et durable à une problématique sociale et qui bénéficie à l’ensemble de la communauté. À l’aube d’un nouveau siècle marqué par de profondes crises (politiques, économiques et environnementales) et inégalités, l’innovation sociale porte l’espoir d’un modèle de développement et du vivre-ensemble qui puisse offrir de nouvelles perspectives pour un avenir plus équitable pour les collectivités.
« Là où croît le péril croît aussi ce qui sauve »
– Friedrich Hölderlin
Des défis qui demandent des solutions inédites
Les crises que traversent à répétition nos sociétés laissent à plusieurs l’impression de l’épuisement d’un modèle, tant économique que politique. Les exemples d’égarements pullulent, des dérives de la finance aux désastres environnementaux en passant par la gestion souvent douteuse des fonds publiques, le plus souvent au profit d’une minorité de nantis. Devant cette situation, un sentiment d’aliénation et de cynisme cause, au sein de la population, un décrochage politique qui n’aide les choses en rien.
Pour plusieurs, les mesures palliatives aux inégalités engendrées par l’économie néolibérale, qui compte sur le support des États comme on a pu le voir lors de la crise économique de 2008, sont désormais insuffisantes. Il importe de repenser beaucoup plus fondamentalement les cadres du vivre-ensemble et les concepts qui le régissent.
À cet égard, le mouvement des communs porte des perspectives novatrices qui pourraient bien permettre un renouvellement de l’économie, du politique et de l’habitation du territoire fondé sur la prise en charge collective et citoyenne des milieux de vie. Ainsi, plusieurs projets émergent, au sein de la société civile, qui permettent de repenser le développement (économique, technologique) et la vie sociale sous un angle inédit : la proximité, la participation citoyenne, le libre accès aux espaces communs et aux biens culturels, etc. L’idée est de « faire ensemble », de s’approprier collectivement les milieux de vie dans une optique de partage et respect des personnes et de la planète, à l’inverse d’un concept de propriété inscrivant les usages dans une logique marchande.
« La folie, c’est de se comporter de la même manière et de s’attendre à un résultat différent »
– Albert Einstein
Repenser la finalité du développement
L’utopie du modèle actuel est, sans conteste, celle d’un développement infini dans un monde de ressources fini. Or, les dérèglements croissants de l’environnement nous montrent assez que cette utopie est, à terme, destructrice pour l’ensemble de la planète. Cette conception du développement orientée vers un marché cherchant une accumulation toujours plus grande de profits et de marchandises crée de nombreuses inégalités, tant économiques que sociales, qui sont de plus en plus décriées par des mouvements comme, par exemple, celui des Indignés ou d’Occupy Wall Street.
Dans ce contexte, le concept d’innovation sociale permet notamment d’élargir la conception du développement pour y inclure ses aspects humains et collectifs, devant ceux de profit et de productivité. L’innovation sociale, en plus de privilégier un impact s’inscrivant dans une logique de développement durable, s’attache à prioriser la créativité, le processus d’innovation et de changement social, ainsi que la participation des personnes visées tout au long du processus de développement.
En favorisant une diversité d’approches pour une même problématique, l’innovation sociale permet d’appréhender une problématique sous plusieurs angles et de façon large, de manière à y apporter une réponse multidimensionnelle qui réponde à sa complexité. Elle se développe aussi dans une dynamique de rétroaction avec les acteurs impliqués, chez qui son appropriation est également prise en compte afin d’en favoriser le caractère durable.
Le Québec a déjà vu plusieurs innovations sociales se développer sur son territoire, à commencer par le mouvement coopératif, notamment les caisses populaires. Depuis plusieurs années déjà, de nombreux acteurs de la société civile et même de certains pouvoirs publics utilisent les processus de l’innovation sociale pour répondre à différentes problématiques. Or, dans un contexte politique et économique où l’idéologie néolibérale domine, jusqu’à quel point l’innovation sociale peut-elle renverser fondamentalement les sources des inégalités et problématiques qu’elle tente d’adresser?
Quelques innovations sociales au Québec
- Le mouvement coopératif
- Le mouvement des FabLab
- La TOHU
- L’École éloignée en réseau
- Imaginons Saint-Marc
Questions
- Comment peut-on favoriser l’innovation sociale au Québec?
- Comment les pouvoirs publics peuvent-ils mettre en place les conditions de l’émergence de l’innovation sociale?
- Comment peut-on favoriser l’émergence des communs dans différents secteurs? Quels modèles (gouvernance, organisationnel, etc.) pourraient les soutenir?